Date de sortie : 14 mars 2014 | Label : Debemur Morti Productions
Sur le thème «"There's no future, no future, no future for you!" Le disque que vous écoutez quand tout semble sans issues, histoire de se rouler dans le désespoir... » de la 8ème édition du Grand Jeu sans Frontières des Blogueurs Mangeurs de Disques.
Puisque tout semble sans issue, autant opter pour un disque qui n'en présente lui-même aucune : peu d'aérations, pas d'ouvertures et encore moins de pause, même lorsque les flots massifs et monochromes qu'il déverse à grands fracas se taisent au profit de passages plus ambient ou synthétiques, ou lorsque le growl puissant et ventripotent laisse la place à des voix claires voire féminines et diaphanes. Même dans ces moments-là, Hyperion reste campé sur ses fondations noires et souterraines. Même dans ces moments-là, il demeure sans issue. Sa résonance particulière, sa mélancolie tenace ont tôt fait d'envelopper l'auditeur, dès l'introduction rampante des huit minutes de Circumpolaris en fait, et ne relâchent leur étreinte qu'à la toute fin. C'est que ce que l'on y entend ne cesse d'interloquer, surtout si l'on est déjà familier de Dirge et des albums précédents où le groupe s'évertuait à dessiner les contours d'un post-metal qui fut à l'origine robotique puis devint de plus en plus atmosphérique pour culminer à des hauteurs insoupçonnées le temps d'Elysian Magnetic Fields, leur opus de 2011. On savait que Dirge pratiquait la mue permanente mais l'on ne s'attendait pas forcément à la teneur de cet Hyperion : à avoir ainsi ralenti la cadence tout en rajoutant des couches supplémentaires de lourdeur, le groupe quitte les eaux encombrées du post-machin pour atteindre celles bien plus inédites d'un sludge minéral aux accents anthracites bien marqués. Tout en longueurs - mais ce n'est rien comparé aux cavalcades interminables d’antan (Wings Of Lead Over Dormant Seas en 2007 par exemple) - les morceaux osent mettre en avant leurs mélodies et leur fragilité, un beau paradoxe quand on sait à quel point ils s'avèrent par ailleurs massifs et inébranlables.
Alors bien sûr, à chercher ainsi l'atmosphère, à exposer ses fêlures et sa sensibilité, il arrive que l'on oublie toute forme de retenue et parfois, Hyperion revêt des atours boursouflés qui prennent la forme de claviers envahissants (Hyperion Under Glass qui n'en reste pas moins remarquable) ou d'une voix légèrement trop déchirante (Floe). Mais c'est bien peu comparé au reste et à tout ce qui fait de cet album un incontournable : growl et chant clair qui grandissent ensemble, se mêlent ou se renvoient alternativement la balle, riffs basaltiques, denses et gris, basse mastodonte qui n'a jamais sonné si post-punk, batterie bestiale qui peut à l'occasion revêtir une armure de porcelaine, claviers aux textures riches et travaillées, dentelle électronique qui grandit où on ne l'attend pas. Tout cela concoure à l'édification de morceaux sans cesse mouvants, tour à tour épiques et éthérés, tout le temps ciel de traîne et envoûtants. Une nouvelle fois épaulé par Nicolas Dick échappé de Kill The Thrill, mais aussi de Milena Rousseau (Miroda) et Tara Vanflower (Lycia), les cinq parisiens accouche d'un monstre hypersensible, d'un colosse aux pieds encore plus fragiles que l'argile. Le disque est ainsi tout à la fois monumental et près de l'os et surtout, il s'éloigne toujours un peu plus de ses influences supposées (pêle-mêle, Neurosis, Godflesh ou Mastodon) pour explorer des territoires qu'il est bien le seul à fouler aux pieds désormais. Dans ces conditions, aucun titre ne sort du lot, ou plutôt, tous en sortent, ce qui rend Hyperion très homogène, monolithique presque : on ne peut pas l'écouter d'une oreille distraite. On rentre à l'intérieur et une fois que l'on y est, on se laisse transporter par les circonvolutions, les digressions, les changements de textures, alternant entre le rugueux, le hérissé et l'ouate, à l'image des seize minutes exclusivement instrumentales de Remanentie qui voient Dirge coiffer tous ses masques un à un sans jamais se départir de sa remarquable justesse et de sa mélancolie.
Ce n'est pas non plus le disque dépressif d'une bande de pandas tristes et hirsutes et d'autres sensations sont convoquées : la neurasthénie habite certes Hyperion mais l'urgence aussi, ainsi que l'apaisement ou la colère. Tout un éventail qui rend le magma terriblement vivant et le fait vibrer d'une pulsation parallèle à notre rythme cardiaque. Dans ces moments-là, se montrant fragile et imparfait, complètement humain, il va sans dire qu'Hyperion devient bien plus qu'un disque.
Alors bien sûr, à chercher ainsi l'atmosphère, à exposer ses fêlures et sa sensibilité, il arrive que l'on oublie toute forme de retenue et parfois, Hyperion revêt des atours boursouflés qui prennent la forme de claviers envahissants (Hyperion Under Glass qui n'en reste pas moins remarquable) ou d'une voix légèrement trop déchirante (Floe). Mais c'est bien peu comparé au reste et à tout ce qui fait de cet album un incontournable : growl et chant clair qui grandissent ensemble, se mêlent ou se renvoient alternativement la balle, riffs basaltiques, denses et gris, basse mastodonte qui n'a jamais sonné si post-punk, batterie bestiale qui peut à l'occasion revêtir une armure de porcelaine, claviers aux textures riches et travaillées, dentelle électronique qui grandit où on ne l'attend pas. Tout cela concoure à l'édification de morceaux sans cesse mouvants, tour à tour épiques et éthérés, tout le temps ciel de traîne et envoûtants. Une nouvelle fois épaulé par Nicolas Dick échappé de Kill The Thrill, mais aussi de Milena Rousseau (Miroda) et Tara Vanflower (Lycia), les cinq parisiens accouche d'un monstre hypersensible, d'un colosse aux pieds encore plus fragiles que l'argile. Le disque est ainsi tout à la fois monumental et près de l'os et surtout, il s'éloigne toujours un peu plus de ses influences supposées (pêle-mêle, Neurosis, Godflesh ou Mastodon) pour explorer des territoires qu'il est bien le seul à fouler aux pieds désormais. Dans ces conditions, aucun titre ne sort du lot, ou plutôt, tous en sortent, ce qui rend Hyperion très homogène, monolithique presque : on ne peut pas l'écouter d'une oreille distraite. On rentre à l'intérieur et une fois que l'on y est, on se laisse transporter par les circonvolutions, les digressions, les changements de textures, alternant entre le rugueux, le hérissé et l'ouate, à l'image des seize minutes exclusivement instrumentales de Remanentie qui voient Dirge coiffer tous ses masques un à un sans jamais se départir de sa remarquable justesse et de sa mélancolie.
Ce n'est pas non plus le disque dépressif d'une bande de pandas tristes et hirsutes et d'autres sensations sont convoquées : la neurasthénie habite certes Hyperion mais l'urgence aussi, ainsi que l'apaisement ou la colère. Tout un éventail qui rend le magma terriblement vivant et le fait vibrer d'une pulsation parallèle à notre rythme cardiaque. Dans ces moments-là, se montrant fragile et imparfait, complètement humain, il va sans dire qu'Hyperion devient bien plus qu'un disque.
Une abstraction, une construction mentale en
miroir, un truc aliénant qui pourtant libère complètement. Quelque chose comme
une voix intérieure. Un truc qui touche en profondeur.
Magistral.
leoluce
J'ai écouté en te lisant pour essayer de me situer ...
RépondreSupprimerBien plus abordable à mes oreilles que pas mal des posts de la maison, la noirceur (ou quoi ou qu'est-ce ...) est patente, et latente ... mais j'aime bien les pandas aussi.
Moi aussi j'aime les pandas, mais c'était trop facile de sortir un Xasthur ou un Blut Aus Nord. Non, celui-là est juste gris, tout le temps gris, et je me suis dit qu'il devait accompagner idéalement les moments dépressifs.
SupprimerCelui-ci n'est pas trop mon truc, je n'ai pas les clés de cette musique. On ne peut pas tout aimer, comme on dit. Mais le choix est parfait pour le thème.
RépondreSupprimerC'est tout neuf ce disque. Belle énergie. Ça tape dur, mais avec maîtrise. Les growls sont assez "abordables". Je reprocherais juste le manque de relief des différents morceaux. J'aime bien quand les chansons s'emballent d'un seul coup. Mais, du coup, on perd en intensité émotionnelle.
RépondreSupprimerTrès bon choix pour le thème du jour
Excellent... Je trouve ça proche de Mon cerveau dans ma bouche de Programme (http://grooveshark.com/#!/search?q=Mon+cerveau+dans+ma+bouche) non?
RépondreSupprimerAh non pas du tout j'avais les deux qui marchaient en même temps... Désolé.
SupprimerEffectivement là il devait y avoir erreur ;)
SupprimerMouis mais du coup je préfère les deux disques en même temps que séparément...
SupprimerUn peu moins impressionnant que le précédent mais j'ai bien accroché, de l'atmosphère, du relief (si si) mais pas de gras. ;)
RépondreSupprimerVous avez pas dû être trop emmerdés avec un thème comme ça ;)
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