Date de sortie : 17 mars 2013 | Label : Time Released Sound
The Ashes Of Piemonte est la réunion de Wil Bolton et de Lee Norris. Le premier est connu comme co-fondateur du label Boltfish et habitué d’Hibernate et de sa sous-division Rural Colours, tandis que le second répond aux alias de Norken, Nacht Plank ou Metamatics. Les deux s’associent pour un projet qui s’inspire du massacre piémontais d’avril 1655, durant lequel les Catholiques attaquèrent les Vaudois réformés. De cet épisode barbare, les Anglais tirent un disque éthéré, à l’image du souffle qui retombe sur une terre et des corps labourés. L’exigent Time Released Sound, label de Colin Herrick, qui a déjà publié plusieurs sorties de Wil Bolton, se démarque par les écrins artisanaux dans lesquels sont proposés ses disques. Il offre ainsi à Winter’s Fire une édition sous forme d’objet garni de parchemins, tissé de brindilles et scellé à la cire.
Si le climat dépeint ne donne pas dans les errances bucoliques, le duo insuffle une dimension hautement organique, ainsi qu’une douce poussière, à ses errements hantés. Le parcours se fait de la rivière aux collines, le paysage a beau paraître riche, il n’en est pas moins aride, indéfini et plongé dans la grisaille. Pourtant l’écoulement des trames d’ambient revêt une étonnante langueur. Au cœur du magma caressant que constituent les épaisseurs sonores composées par Bolton et Norris s’épanouissent de lentes nuées de guitare, les craquements attendus du feu hivernal et des field-recordings qui se noient avec grâce dans les textures pluvieuses des strates. L’indolent mouvement de l’air s’accompagne parfois d’échos de voix cinématographiques ou de souffles à peine humains, s’enroulant autour d’une boucle. Sur Under The Shadow Of Religion, c’est le piano de Shintaro Aoki qui escorte avec régularité la guitare et quelques lucioles synthétiques.
Outre la finesse de la composition et la luxuriance de ce dédale de cendres, on peut s’attarder, plus prosaïquement, sur la beauté des introductions de ces sept morceaux. Durant autant de minutes en moyenne, les enchaînements de l’un à l’autre se font de manière liquide, les drones se soulevant comme autant de masses aériennes et empruntant un méandre nouveau, traversé d’essaims grésillants. Ainsi la structure doucement pulsée du rythme qui achève Under The River se fond dans l’ouverture à la fois aquatique et caverneuse du majestueux Ordained By Winter’s Fire. Dans leur prolongement, Faraway sonne comme la pièce la plus veloutée, la plus magnifiquement sereine de l’album, tandis que les remous gémissants de God On The Hill charrient des lambeaux d’angoisse, replaçant au centre le caractère puissamment embrasé, quoique tout en retenue, de Winter’s Fire.
Navigant entre une délicatesse léthargique, pâle et effervescente et une atmosphère sépulcrale, le premier disque de The Ashes Of Piemonte transporte loin. Tout au fond, sous les cendres.
Manolito
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