jeudi 24 octobre 2013

Orla Wren - Book Of The Folded Forest


Date de sortie : 15 août 2013 | Label : Home Normal

Photographe itinérant et compositeur, l’anglais Orla Wren s'est vu accueilli à bras ouverts par Home Normal, maison dédiée à l’ambient et aux musiques électro-acoustiques gérée par Ian Hawgood. Après deux albums et un élégant EP en collaboration avec Offthesky et Isnaj Dui 85% sorti en septembre – celui qui se dénomme également Tui a réalisé Book Of The Folded Forest, une œuvre qui se décline en 13 morceaux et sept vidéos, et qui s’accompagne d’artworks réalisés par Urban9, à mi-chemin entre une douceur sépia et une atmosphère de Ruban Blanc.  

Avec plus d’une heure de folktronica langoureuse, le pari de maintenir l’engourdissement de l’auditeur à distance n’était pas sans enjeux. Mais que l’on ne s’y trompe pas, Book Of The Folded Forest est fait d’un bois mature et dense, qui enjambe sans mal l’écueil de la doucereuse linéarité qui peut être liée à ces genres musicaux. Orla Wren a su joliment s’entourer : Katie English, Jessica Constable, Frederic D. Oberland, Keiron Phelan et d’autres ont collaboré à l’album. Nuls autres que Aaron Martin et Danny Norbury l’accompagnent au violoncelle. 

Si à un disque peut correspondre l’atmosphère d’un lieu, il n’est de grande révélation à situer celui-ci au cœur d’un bois humide, entre les tourbillons légers de feuilles mortes, dans l’ambiguïté entre une franche beauté végétale traversée de poésie enfantine et l’esprit poisseux et glauque de la nuit tombant trop vite. Ce même tiraillement entre innocence et angoisse s’applique aux photographies jaunies d’enfants d’un autre siècle qui accompagnent le disque, celle de deux petites filles vêtues de manière identique n’étant pas sans rappeler les jumelles lugubres de Kubrick. Si cette ambivalence s’imprime en filigrane le long des treize titres, la musique connaît tout de même un tropisme vers une fauve délicatesse, une langueur plus mélancolique que macabre. Le violoncelle et la guitare acoustique dessinent le lit de volées aléatoires de pépiements, de tapements de bois, de froissement de feuillage et d’équivalents sonores de pas sur un sol d’hiver. Les mélodies engourdies vacillent comme des flammes de bougies, semblent chercher leur chemin pour enfin s’épanouir sur place, chaleureuses et fantomatiques. 

Le chant de Paddy Mann (Grand Salvo), intervenant sur le premier et le dernier morceau, y est pour beaucoup dans la chaleur et la beauté du disque. Il accompagne également à la guitare sèche le renversant The Words Under The Wood, mais c’est surtout son chant, déployant ce qu’il faut de douleur et de retenue, qui caresse les nerfs et fait tressaillir le cœur. La vidéo qui y est associée, signée Lumacell, parvient à amplifier les émotions ressenties, tout en illustrant la tension entre enfance et noirceur intrinsèque à l’œuvre. Sur les sept films réalisés, tous visibles sur le site de l’artiste, on saluera en particulier ceux de Elise Baldwin et de Skinofthetree

Un disque d’automne voué à durer bien plus qu’une seule saison.
Manolito

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