samedi 4 février 2012

Ural Umbo - Delusion Of Hope


Date de sortie : 11 novembre 2011 | Label : Utech

Delusion Of Hope, troisième long format de l’énigmatique entité formée par Reto Mäder (RM74, Sum Of R, également aux commandes d'Hinterzimmer Records) et Steven Hess (Haptic, ON et Locrian entre autres projets), partage quelques points communs avec ses prédécesseurs : des cymbales et gongs omniprésents, des drones inquiétants et une musique lente, qui prend son temps pour asseoir un climat à la fois subtil, majestueux, éthéré et angoissant ainsi qu'une sortie fin 2011 pour être sûr de n’apparaître dans aucun bilan. Un disque qui n’a nul besoin que l’on aménage l’espace autour de lui ou du moins son écoute (style dans le noir, au casque, en pleine nuit) puisqu’il se suffit à lui-même et impose son atmosphère sans peine : il n'y a qu'à lancer l’album et quel que soit le temps qu’il fait, quelle que soit l’heure à laquelle on l’écoute, quelque soit l’endroit où l’on se trouve, il plie le temps et l’espace autour de lui et vous projette irrémédiablement dans le noir, le froid et l’inquiétant. Tout en étant, encore une fois, parfaitement superbe.

Certes, pas de nouveautés à l’horizon, quoique, à bien y réfléchir, il semble bien que sur cet album, le duo pousse plus loin ses idées, ses intentions tout en gardant une formule qui lui est propre et il en résulte un album extrêmement varié même si l’atmosphère générale recouvre tous les morceaux des circonvolutions épaisses et roides de sa robe de bure : encore une fois, comme sur les précédents, l’ambiance n’est pas précisément des plus optimistes et le duo laisse ses angoisses et ses idées noires, graves ou simplement mélancoliques couler dans sa musique, la recouvrant d’une épaisse couche de charbon. Pour preuve, les percussions saturées qui se heurtent aux nappes crades et parasitées du formidable Sych tranchent avec le morceau précédent, presque lumineux mais paradoxalement inquiet, Initial Magnetization Curve qui ouvre parfaitement l’album mais également avec le suivant, This Dead And Fabled Waste, parfait score pour un film qui mettrait en images et explorerait les couloirs infinis de la très inquiétante Maison Des Feuilles de Mark Z. Danielewski avec cris de monstres étouffés ou voix humaines déformées à chaque embranchement. Trois morceaux sombres mais qui explorent le dégradé continu des ombres du cercle chromatique, coincés entre le gris et le noir. Et qui permettent en passant de souligner encore une fois le pouvoir d’évocation des pièces sonores érigées par le duo, un pouvoir fort, cinématographique, qui fait naître quelques courts-métrages derrière les yeux sans qu’on le veuille vraiment. Pas un morceau ne ressemble aux autres et pourtant, le climax reste le même : nappes ou percussions, d’abord seules puis ensemble, concourent à la construction d’atmosphères hantées où tous les instruments se percutent ou agissent de concert mais pourtant aucun point commun entre le saisissant Self Fulfilling Prophecy et l’alambiqué So Here I Live… Sorry, un peu le morceau-somme de Delusion Of Hope, entame pure et cristalline et développement crade et plombé, un morceau impressionnant qui trace, dans le même temps, deux voies parallèles : l’une claire, l’autre étouffée. Aucun point commun si ce n'est cette façon bien particulière d'attirer les pensées et les sentiments au fond de soi pour les dissoudre complètement et faire en sorte qu'il n'en subsiste rien, le corps entier concentré sur les ambiances glacées charriées par le duo. On n'écoute plus Delusion Of Hope, on en fait alors partie.

On le voit, la musique d’Ural Umbo continue à s’étoffer, l’expérimentation menant à une formule de plus en plus maîtrisée et cohérente, mêlant shoegaze, metal, poussières minimalistes ici, agrégats électroniques là, drone partout ailleurs et tant d’autres choses. On soulignera particulièrement le jeu ahurissant de Steven Hess devant, derrière, à côté et autour de sa batterie lui qui en dépasse l'utilisation stricte pour faire autre chose, les morceaux d'Ural Umbo doivent beaucoup à ses percussions lentes, sèches, fracassées ou déformées, aux cymbales qui soulignent et rehaussent les drones alambiqués de Reto Mäder, hésitant toujours entre ambiances plombées et envolées lumineuses, la conjugaison de ces deux inspirations menant droit à une ambient singulière, extrêmement noire mais dans le même temps, aérée. Un curieux mélange à la posologie casse-gueule mais parfaitement maîtrisée. Et au fur et à mesure que le duo creuse son sillon, il empile dans le même temps les strates, à la fois toujours plus bas et toujours plus haut et c’est bien ce double mouvement qui rend leur musique si particulière. On notera enfin que l'artwork est encore une fois superbe mais pouvait-on s'attendre à autre chose d'une sortie estampillée Utech Records ?

Mais trêve de long discours, la vidéo ci-dessous devrait suffire à traduire ce que réserve l’écoute de Delusion Of Hope, expérimental certes, noir aussi mais surtout parfaitement prenant. Et pour tout dire, magnifique.


Pour explorer plus avant l'univers du duo, lire les chroniques de Ural Umbo et Fog Tapes.

leoluce

4 commentaires:

  1. Très bon blog, une bien belle écriture, je passerai régulièrement !
    (J'ai un blogspot également, je me permet de partager http://havefaithinsound.blogspot.com/)

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    1. Salut ! De bien bonnes choses sur ton blog, j'aime notamment beaucoup ces albums d'Integral et d'Amorph dont j'avais parlé à l'époque sur Indie Rock Mag. On devrait s'entendre !

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    2. Bienvenue par ici, et c'est franchement bien parti pour, qu'à mon tour, je passe régulièrement sur le tien...

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  2. Je pense avoir quelques références qui vous plairont, à l'occasion je ferai tourner!

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